terre-vue-d-anouck

Des mots couchés sur pixel

Mardi 10 août 2010 à 22:35

Chapitre 5 : La tour du savoir

Après quelques mouvements d’ailes, la fée atteignit enfin les lourdes portes du donjon qui étaient closes. Elle avisait une fenêtre au-dessus d’elle lorsque dans un grincement d’outre-tombe, les gonds se murent et les deux pans s’éloignèrent lentement l’un de l’autre pour laisser une petite ouverture suffisante pour lui permettre d’entrer. Un peu angoissée par tous les évènements étranges qui la touchaient en si peu de temps, elle s’avança tremblante dans l’obscurité du lieu et arriva dans un hall immense. En son centre était étalé un long tapis rouge bordé de fils d’or qui montait vers des escaliers de marbre majestueux. Ces derniers s’enroulaient de part et d’autre d’une porte en fer au niveau du premier palier pour atteindre d’autres étages. De chaque côté du hall, de grandes portes menaient aux cuisines ou à des grandes salles créées pour recevoir des invités de marque. La pièce en haut de l’escalier était la salle du trône mais sa porte était close. Des chandeliers éteints étaient placés à intervalle régulier le long des rampes de l’escalier et un lustre de cristal accroché au sommet de la pièce vibrait doucement bercé par le vent et émettait un son de carillon. La fée était stupéfaite devant tant de luxe et de beauté. La place avait gardé beaucoup de majesté malgré les nombreuses années qui avaient écoulé leur douce mais irrémédiable emprise sur ces lieux. Avançant doucement, craignant de troubler la tranquillité du lieu et souffrant du silence oppressant qui l’entourait, tout juste troublé par le doux son du lustre, elle appela :
« Y’a quelqu’un ? » sans espoir de réponse.
Alors que l’écho de ses mots s’éteignait dans les profondeurs du palais, un vent glacial venant de la porte restée ouverte souffla la faible fillette vers l’escalier et la propulsa au bas de la première marche. Se redressant difficilement, elle frotta sa tête endolorie. Un bruit sourd retentit et elle ne put que constater que la porte d'entrée venait de se fermer brutalement.
« Au moins il n’y aura plus de vent violent » pensa-t-elle en essayant de se rassurer, son corps encore frissonnant du froid qui l’avait entourée. Un escalier immense s’étendait au-dessus du tapis de velours rouge. « Heureusement que j’ai des ailes, sinon je n’arriverais jamais à monter là-haut ! » se dit-elle en écarquillant les yeux. La fée décida tout de même de monter la première marche sans les utiliser. Elle agrippa son bord et après un petit effort, réussit à se hisser à son sommet. La marche suivante était légèrement plus élevée puisqu’il lui fallait sauter pour l’atteindre et cela attira son attention. « Je pense que j’ai suffisamment utilisé mes bras pour aujourd’hui » se dit-elle et dépliant ses ailes, elle s’apprêta à s’envoler. Une douleur lui fit alors courber le dos et en se retournant elle vit que ses ailes étaient recouvertes d’une mince couche de givre. Il fallait trouver une source de chaleur pour les réchauffer, sinon aucun vol ne lui serait permis peut-être même de manière permanente. La fée affaiblie fit un tour du hall mais les portes étaient toutes bien closes. Alors résignée elle commença à grimper le long escalier, en espérant trouver une aide au premier étage.

Les premières marches furent plutôt aisées à monter mais bien vite un obstacle de taille obstrua son ascension. Même en sautant le plus haut qu’il lui était possible, la dixième marche de l’escalier lui était inaccessible. Elle s’assit un instant là et se mit à réfléchir. « Ce qu’il me faudrait c’est quelque chose sur lequel monter » se dit-elle, mais elle eut beau scruter de toute part les recoins du hall depuis son perchoir, rien ne semblait pouvoir l’aider. Tout en réfléchissant la fée regarda ses mains et vit que ses ongles étaient très sales. Elle n’était pas très coquette mais tout de même ! En fait si, la coquetterie était un de ses plus gros défauts mais elle ne voulait pas se l’avouer. Elle sortit donc la dague de son fourreau et se mit à enlever la saleté qui s’était accumulée sous ses ongles. Mais soudain une idée la traversa, arrêtant net son ouvrage. Son regard passa de l'arme à la marche et de nouveau à la lame. Elle se précipita alors en avant et planta la lame dans le bois de l’escalier. Posant son pied dessus, son système astucieux lui permit de se hisser à la marche suivante. La fillette se pencha ensuite et essaya de récupérer son arme… mais avait le bras trop court pour cela. Elle redescendit donc et planta la lame plus haut pour pouvoir la récupérer et ça fonctionna ! Heureuse d’avoir trouvé une solution, son ascension se poursuivit avec un entrain renouvelé. La porte de la salle du trône se faisait plus grande à mesure qu'elle s’approchait et enfin elle se hissa au premier étage. Devant elle, l’immense gardienne de fer se tenait droite comme si elle protégeait toujours un roi tout aussi majestueux qu’elle. La fée s’approcha et colla son oreille à la lourde porte. Aucun son ne lui parvint. Elle poussa un soupir et se mit à chercher d’autres portes à l’étage. Un couloir qui s'enfonçait vers la gauche de la grande salle fut son premier choix de direction. Toutes les portes étaient fermées sur la route et la fatigue commençait à se faire sentir. Elle déboucha de nouveau devant la porte en fer après avoir fait tout le tour de l’étage. Les escaliers qui menaient au deuxième étage lui semblèrent aussi hauts et tortueux qu'une montagne. La dure ascension reprit.
Cependant les marches devenaient de plus en plus hautes et elle se rendit vite compte que sa technique utilisant la dague n’allait plus fonctionner bien longtemps. Et bientôt, l'une des marches fut si haute que ses bras ne purent récupérer la lame. Elle redescendit donc d’un cran et se remit à réfléchir. Après quelques minutes d’intenses réflexions une nouvelle idée lui vint. La fée arracha un de ses longs cheveux et l’accrocha à la poignée de la dague. Puis elle monta dessus, grimpa sur la marche suivante, le cheveu toujours dans sa main et arrivée en haut, tira dessus pour faire remonter la lame. « Pour une fois qu’il y a une utilité à la solidité de mes cheveux » pensa-t-elle en se rappelant les nombreux peignes qui s'étaient brisés sous ses assauts répétés pour se coiffer. La pauvre fillette aux ailes blessées put ainsi reprendre et terminer son ascension.

Elle se hissa enfin au deuxième étage en soufflant et maugréant. Les escaliers continuaient de monter de chaque côté et une grande porte rouge se trouvait en face d’elle. Alors qu'elle avançait droit devant, un tintement la fit sursauter. Un lustre s’agitait aussi à cet étage-ci, loin au-dessus de sa tête. La porte se rapprocha petit à petit, au rythme de ses pas fatigués. Une vibration sembla emplir l’air alors que sa main frôla le bois et soudain ce fut comme si une onde la traversait et se propageait dans toute la pièce. La porte s’ouvrit et un nouvel escalier apparut. Il était taillé directement dans la pierre mais décoré avec soin et des bougies étaient posées toutes les trois marches. Après que l’onde se fut répercutée sur le mur opposé, elle revint et alluma toutes les bougies sur son passage, illuminant ainsi le chemin qui montait vers la tour du savoir. Lentement la fée s’avança, les yeux écarquillés devant un tel spectacle. Elle monta la première marche et s’installa près de la bougie pour réchauffer ses ailes. Après un quart d’heure, les fines membranes s'agitaient gracieusement prêtes à la faire décoller. Elle fit quelques looping pour se dégourdir et pour montrer son contentement avant de filer comme une flèche vers les étages supérieurs.
L’escalier était immense et l'ascension semblait sans fin. Lorsqu’elle arriva en haut, une fenêtre attira son attention. La nuit était tombée au dehors mais comme c’était la pleine Lune le paysage se dessinait assez clairement. Devant la fillette, la ville avait un air lugubre sous cette lumière faiblarde. Au loin la plaine s’étendait alors qu’à l’est une montagne se dressait fièrement et qu’au sud la Lune se reflétait sur le lac. Bien plus loin vers l’ouest le désert était caché sous une étrange brume. Une tempête de sable faisait sûrement rage sur les dunes. Le décor la rendit un peu triste, surtout la plaine vide qui rougeoyait sous les rayons de la Lune, elle qui avant était si remplie de vie et dont le ranch était connu de par le monde. L’établissement avait été totalement détruit et seules quelques pierres qui étaient anciennement les grands murs de l’étable restaient présentes, enfouies en partie sous les herbes rouges. La fée détacha son regard de ce triste paysage et se retourna pour faire face à l’arche d’entrée de la bibliothèque de la connaissance. Il ne lui restait plus qu’à trouver le livre dont parlait la lettre du soldat et de se servir de son contenu à bon escient malgré le fait qu’elle n’ait aucune idée de ce qu’il pouvait renfermer.

Aucun commentaire n'a encore été ajouté !
 

Ajouter un commentaire

Note : terre-vue-d-anouck n'accepte que les commentaires des personnes possédant un compte sur Cowblog : vous devez obligatoirement être identifié pour poster un commentaire.









Commentaire :








Votre adresse IP sera enregistrée pour des raisons de sécurité.
 

La discussion continue ailleurs...

Pour faire un rétrolien sur cet article :
http://terre-vue-d-anouck.cowblog.fr/trackback/3027387

 

<< Page précédente | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | Page suivante >>

Créer un podcast