terre-vue-d-anouck

Des mots couchés sur pixel

Mardi 10 août 2010 à 22:45

Chapitre 11 : Les artefacts

Une fois dehors ils virent la grandeur des falaises entourant la vallée suivie de l'immense étendue sableuse où la tempête faisait encore rage. Le cheval broutait non loin. Line alla directement vers lui et se mit à chanter d'une voix douce l'air depuis longtemps perpétué que Link utilisa pour apprivoiser Epona. Doucement l'équidé remua les oreilles et les tourna vers elle puis il s'approcha et posa ses naseaux sur la main tendue de la jeune fille.
- Je vais t'appeler Anope, dit-elle tendrement, car je suis sûre que tu es un descendant d'Epona !
Zinéta et Giro s'avancèrent à leur tour. Le jeune garçon flatta l'encolure mais alors que Zinéta s'approchait, Anope recula craintivement.
- Je n'ai jamais eu autant de promiscuité que vous avec les animaux, désolée, dit-elle en rougissant et baissant les yeux.
La fée observait cette scène avec un sourire. Elle était heureuse d'avoir effectué cette partie de la mission et désormais tout ne reposait plus uniquement sur ses épaules, ce qui la rassurait et lui permettait d'avoir le cœur plus léger quant aux épreuves à venir. Un sentiment d'unicité se dégageait du groupe d'enfants et elle comprit alors pourquoi la Triforce était d'un si grand pouvoir. Séparés dans des voies et des objectifs différents chacun des pouvoirs ne pouvait que s'affronter, mais réunis ils s'équilibraient sur une balance à trois branches et dégageaient une forte aura, donnant l'impression qu'ils étaient intouchables. « Nous avons une chance », se dit la créature, « et non pas, comme je l'ai cru au début, de se battre quitte à mourir pour réduire les ténèbres, mais bel et bien de vaincre et de former un monde nouveau... ». Un cri la sortit de ses pensées.
- Regardez, sur son dos !
La fillette s'approcha en volant et vit que Zinéta montrait du doigt l'arrosoir qu'elle y avait accroché avec une cordelette de ses cheveux tissés. Line s'avança et décrocha l'ustensile puis le tendit à sa camarade.
- Il est de nacre et il y a écrit « Trouvez mes deux compagnons, pour vaincre les démons. ». C'est l'un des trois artefacts de la légende ! s'écria-t-elle avec un grand sourire. Et en voici la preuve.
Avec sa manche elle en frotta l'anse qui était restée jaunie par le sable. Là se trouvaient gravées des runes d'un langage inconnu qui tournaient autour de haut en bas.
- C'est de l'hylien ancien. Bien avant le temps où Link et la princesse Zelda renvoyèrent Ganondorf dans l'ombre, ce langage était utilisé. Il est écrit « Cadeau des Zora au roi Daphnes Mondar I ». Et si cela ne suffisait pas il y a bien sûr son pouvoir ! « Vide à jamais tu seras mais celui qui d'eau nourrissante aura besoin, saura le trouver en ton sein. ».
Sur ces mots elle agita l'arrosoir qui n'émit aucun bruit, puis le penchant vers l'avant ils purent tous admirer le miracle que la fée avait déjà pu observer. A chaque goutte qui touchait le sol une fine tige verte s'élevait et au fur et à mesure ce ne fut plus seulement de l'herbe mais des fleurs et des plantes grimpantes et enfin un arbrisseau qui apparurent. L'air était désormais emplit d'une douce saveur exotique ravissant l'odorat alors que les couleurs puissantes des fleurs donnaient l'impression en les regardant que pour la première fois on avait ouvert les yeux sur le monde. On pouvait appeler le rouge, « rouge » et le printemps semblait s'installer autour de soi rien qu'en se plongeant dans le vert des feuillages. Au bout d'un moment pourtant elles se mirent à flétrir et seul le sable resta, là où un jardin étendait quelques secondes avant son ombre. Ils frémirent tous à la disparition de la dernière tige et ce fut comme si tout bonheur s'était enfui de leurs cœurs. Cependant ils se reprirent bien vite car le charme magique de cet artefact avait une durée limitée et leurs esprits furent de nouveau éclairés par la réalité. Ils observaient la tempête de sable, se préparant à une difficile traversée lorsque, comme influencée par le pouvoir détenu par les enfants, elle diminua en ampleur jusqu'à ne devenir qu'un faible vent balayant le sable. Line accrocha à nouveau l'arrosoir sur Anope puis ils partirent.
Il était déjà le début de l'après-midi mais ils avançaient d'un bon pas. Line courrait et s'amusait, faisant des roulades et des bonds, sa période de léthargie n'avait pas affecté ses muscles et elle était trop heureuse de retrouver sa liberté. Zinéta riait en la regardant et Giro avait remonté sa cape noire jusqu'à son nez si bien qu'on n'apercevait que ses yeux bleus scrutant les alentours. Dans ses mains, il serrait l'encyclopédie des monstres. La fée, quant à elle, était allongée sur le dos d'Anope et regardait le ciel. Certaines questions, qu'elle partageait avec Giro sans le savoir, revenaient à son esprit. Pourquoi aucun être maléfique n'avait tenté de l'arrêter ? Avaient-ils été détruits dans leurs propres colères et conflits ? Mais dans ce cas pourquoi la nature ne s'était pas régénérée ? Non il y avait une puissance ténébreuse qui étendait encore ses bras sur le monde et il leur faudrait la combattre. Quelle était-elle ? Y'avait-il toujours un groupe de mages noirs comme dans la légende, ou l'un d'eux avait-il dominé et pris le pouvoir ? Elle aurait aimé en savoir davantage mais le destin semblait se complaire à ne leur donner des informations qu'au compte-goutte. L'assoupissement la gagna au milieu de ces idées troublantes et elle s'éveilla après avoir fait un magnifique rêve qu'elle oublia immédiatement. A la nuit tombée ils avaient atteint l'oasis. Ils poursuivirent jusqu'à l'endroit où la fée avait trouvé l'arrosoir puisqu'il n'y avait qu'une heure de route et que le vent du désert était très froid la nuit. C'est donc abrités par les hautes falaises entourant l'entrée de l'étendue sableuse qu'ils s'assoupirent. Il n'y eut pas d'incidents pendant la nuit et l'aube s'était levée depuis plus d'une heure quand ils s'éveillèrent. La fillette ailée les guida alors jusqu'à la plaine.

Ce fut le vrai choc pour les trois jeunes gens. Le désert pour eux n'était pas un lieu de leur vie habituelle et ils en avaient très peu de souvenirs mais la plaine… Pour eux c'était un synonyme de fraicheur, de paix, d'un vaste univers verdoyant et calme où les animaux se promenaient souvent librement. Devant eux ce n'était que désolation, rouge et noir, ténèbres et mort. Un désespoir puissant s'empara d'eux alors qu'ils voyaient enfin l'ampleur du pouvoir adverse et de leur tâche. Même s'ils le vainquaient un jour, rien ne serait comme avant. Zinéta tomba à genoux et se mit à pleurer en serrant ses bras autour d'elle, comme aux prises d'une grande douleur. Line était comme paralysée, tremblante et les poings serrés. Quant à Giro, ses yeux, seul élément visible de son visage couvert, étaient écarquillés comme sous l'effet d'une grande terreur. La fillette ailée les observa un moment puis passa de l'un à l'autre pour les rassurer en faisant tomber de la poussière magique de ses ailes dans un tintement mélodieux. Ils durent faire une pause avant de repartir car l'émotion avait été telle, qu'elle leur avait enlevé toutes leurs forces. Ils ne parlèrent pas entre eux et c'est silencieusement qu'ils reprirent leur route. Zinéta était très pâle et la fée s'inquiétait pour elle, restant à ses côtés car la jeune fille semblait sur le point de s'évanouir. Ils s'arrêtèrent arrivés au centre de la plaine et se demandèrent comment ils devaient agir maintenant. Il n'y avait aucune nourriture alentour et la faim commençait à être insoutenable.
- Il faut trouver à manger.
Disant cela, Line se tourna vers Zinéta qui semblait perdre des forces à chaque instant qui passait.
- Nous avons plusieurs choix de directions. Le lac, la montagne, le bourg ou la forêt.
Ils regardèrent vers chacun de ces lieux. La montagne était rocheuse et il y avait peu de chances qu'ils trouvent quelque nourriture que ce soit. Le lac était sans doute utile pour récupérer de l'eau mais à part des racines comestibles il n'y avait pas grand-chose. La forêt semblait un bon choix si les arbres noircis et tombés qu'ils apercevaient de là ne les avaient pas dissuadés. Ils supposèrent qu'il restait peut-être quelques vivres dans le bourg désolé que leur amie n'avait fait que traverser et ils pourraient trouver un lieu abrité pour y passer la nuit. Ils avancèrent donc dans cette direction, assez lentement car le cheval ne pouvait porter que deux des enfants à la fois et pour ne pas le fatiguer, ils ne montaient qu'un à un. Seule Zinéta ne s'approcha pas de la selle car Anope semblait toujours la rejeter et bientôt elle fut très fatiguée. Giro qui venait de chevaucher la regardait du coin de l'œil, elle semblait être sur le point de s'endormir, sa tête dodelinant de droite à gauche. Il s'approcha rapidement d'elle quand elle trébucha et la hissa sur son dos. Elle s'était assoupie. Ils reprirent ainsi la route.
Au début de l'après-midi, alors que le gargouillis de leurs estomacs accompagnait chacun de leurs pas, ils atteignirent le bourg. Ils cherchèrent tout d'abord de la nourriture et des armes car plus le temps passait et plus la méfiance s'accentuait quant aux plans de leurs ennemis. Dans une auberge dont la toiture avait été arrachée, révélant au ciel les poutres de sa structure, la lourde trappe d'une cave avait été dissimulée par un vaisselier tombé dessus et après des efforts douloureux, espérant qu'ils n'utilisaient pas leurs dernières forces en vain, les jeunes gens parvinrent à l'ouvrir et découvrir de nombreuses denrées. Une odeur de pourriture flottait dans l'air et des champignons avaient poussé dans l'humidité du sous-sol mais des fruits secs, des fèves, du riz, de pâtes et du vin restaient en assez grande quantité. Après avoir mangé, il leur fut plus facile de poursuivre les recherches. Au marché, des sacoches de cuir de belle manufacture furent récupérées puis chez le forgeron une épée pour Line (qui afficha un air un peu déçu en jetant un œil à la lame bleutée de la fée) et deux dagues pour Giro et Zinéta, les seuls objets qui n'avaient pas été écrasés sous les décombres ou déformés par la magie puissante qui avait opéré en ce lieu. De retour à l'auberge, ils remplirent leurs sacs puis traînèrent des matelas de paille sous une toiture plus solide. Il faisait nuit quand ils s'installèrent et s'assoupirent dans leur abri de fortune. Aucun d'eux ne veilla assez pour voir une fumée bleutée s'élever en volutes dansants au-dessus du mont du péril.

A l'aube ils reprirent la route après un bon petit déjeuner dans la cave de l'auberge. L'air était étrangement lourd et une odeur gênante les prenait à la gorge. Arrivés au milieu de la plaine cependant, ils se sentirent plus légers et repartirent d'un bon pas après une courte pose. Ils avaient décidé d'aller au lac car s'ils avaient déjà découvert le présent des Zora au roi de la légende il n'était pas dans le lieu qu'ils auraient imaginé. Ils avaient donc supposé que le sabre serti de rubis des Gerudo était soit au lac, soit à la montagne et entreprendre l'ascension d'un tel monticule leur semblait l'étape la plus difficile. Aussi il était préférable de vérifier qu'ils ne faisaient pas erreur en allant d'abord au point d'eau, plus accessible. Durant le cheminement, Line commença à initier la fillette ailée au maniement de Balicurex.
- Tu as déjà appris qu'elle pouvait servir de clé dans certains socles en nous libérant, dit-elle. Sache aussi que la lame peut se diviser en deux pour frapper de plusieurs côtés.
-Euh… A vrai dire, elle se cisaille en cinq, répondit la fillette.
- Comment ?! s'exclama Line surprise, attirant l'attention de Zinéta et Giro.
Ils s'approchèrent et la fée fit une démonstration sous leurs regards ébahis.
- Waaaah ! Comment tu as fait ça !? reprit la jeune fille brune.
- C'est Balicurex qui s'est métamorphosée ainsi, depuis je ressens sa lame comme si elle était ma main.
Pour le leur prouver, elle bougea chaque doigt, ferma la lame en un poing et l'ouvrit de nouveau.
- C'est super ! Je ne savais même pas que c'était possible !
- Moi non plus, répondit Balicurex.
Line resta un instant à réfléchir mais bientôt l'entraînement reprit. Arrachant de petites branches à un arbre mort allongé près de l'ancienne route, elle se mit à attaquer son amie qui apprenait ainsi les coups d'estoc, de taille, l'attaque tourbillon, l'attaque sautée et comment parer. Les enchaînements étaient si prenants qu'elles auraient quitté la bonne direction si Giro et Zinéta ne les avaient pas rattrapées. Vers midi ils firent à nouveau une pause en mangeant peu de nourriture. La terre devenait plus humide et le sol plus poreux. Bientôt les premiers reflets de l'eau se virent au loin, séparés d'eux par une étendue de plaine et la petite vallée qui menait au lac. Vers le milieu de l'après-midi ils parvinrent enfin aux rives. Line et la fée étaient très fatiguées aussi s'allongèrent-elles pendant que Giro et Zinéta cherchaient des indices. Ils retournèrent bientôt près d'elles avec des racines pour seule trouvaille. La créature ailée en prit un centimètre et alla voleter ça et là en la grignotant et en agitant sa lame dans le vide, répétant les mouvements qu'elle avait appris. Il était très important de réussir son apprentissage pour pouvoir combattre les monstres car elle se disait enfin que peut-être Balicurex était bien destinée à rester à son bras. Son regard fut attiré par un mouvement au fond de l'eau à quelques mètres de la rive où ses amis se trouvaient. S'approchant, elle avisa un gros poisson aux reflets rouges qui la fixait de ses yeux ronds. D'un battement d'aile, la créature s'éloigna pour éviter qu'il ne la prenne pour un insecte mais soudain l'animal devint comme fou et s'élançant en l'air, la goba. Cependant au lieu de retomber dans le lac, il resta figé ainsi en suspension. Une fumée noire l'enveloppa et sous le regard terrifié des trois jeunes gens il enfla jusqu'à faire près de vingt mètres de long. Zinéta se mit à trembler, son visage devint blanc et se couvrit de sueur. Line indiqua d'un geste à Giro de s'occuper d'elle et dégainant son épée, elle s'avança vers le monstre et attira bien vite son attention en portant le premier coup à la lèvre inférieure de la créature avant de reculer en un saut périlleux arrière. A chaque seconde qui s'égrainait la peur de ce qui était arrivé à ses deux amies grandissait et envahissait son esprit. Heureusement son courage lui permit de faire face et de se reprendre avant la prochaine attaque du monstre qui écrasa avec violence une de ses nageoires la manquant de peu et déclenchant une grande vague qui la trempa. Line se retourna un instant pour voir que Giro avait porté Zinéta à l'abri d'un rocher et revenait en courant vers l'arène. Elle agita ses cheveux bruns alourdis par l'eau puis se précipita dans la bataille, il fallait trouver le point faible de ce tas de chair et de haine qui se dressait devant eux. Dans un enchaînement rapide et adroit elle frappa ses lèvres, des nageoires et un bout de ventre qui était visible. Rien ne semblait faire effet. Giro la rejoignit en même temps qu'il rangeait l'encyclopédie dans son sac.
- C'est un Dichentraure. Son point faible se situe au bas de sa queue. Il peut envoyer différents projectiles d'eau avec sa bouche et a une force phénoménale. Il grossit encore plus s'il est énervé…
Ils sautèrent chacun de côté alors qu'une bulle d'eau s'abattait entre eux de la bouche du poisson.
- J'attire son attention et tu t'occupes de sa queue, ordonna Line. Ta dague ne te permettra pas de le prendre de front, mais mon épée si.
Dans un cri de guerre, elle courut vers le monstre et fut ravie de voir ses yeux se fixer sur chacun de ses mouvements. Arrivée devant ses mâchoires qui s'écartaient, prêtes à lui lancer un jet d'eau puissant, elle sauta et atterrit sur le haut de sa tête. Elle la frappa ainsi que la nageoire dorsale mais rien ne semblait fonctionner. Un gargouillement ressemblant à un rire lugubre se fit entendre. Pas plus déconcertée que ça, Line assena encore des coups sur tous les endroits qu'elle pouvait atteindre et soudain, empoigna la garde à deux mains pour enfoncer la lame dans l'œil du monstre. Dans un cri strident l'épée s'enfonça et le Dichentraure ferma sa paupière, la déchirant sur le flan aiguisé et bloquant l'arme dans sa blessure. Un flot de sang s'écoula. La jeune fille regarda la queue de la créature s'abattre furieusement sur les flots.
- Giro ! hurla-t-elle en voyant un morceau déchiré de sa cape flotter sur l'eau déchaînée.
Sans plus réfléchir elle courut sur le dos glissant du poisson et prenant son élan, plongea dans les vagues. Elle en ressortit, un peu sonnée, cherchant alentour une trace de son ami. S'enfonçant à nouveau sous l'eau elle aperçut enfin une botte et une jambe dissimulée sous la queue du monstre. Nageant de toutes ses forces, elle trouva Giro accroché sur le côté de l'appendice caudal où il avait planté sa dague, malmené par les vagues, épuisé, les yeux se fermant. Elle le récupéra tant bien que mal quand le Dichentraure remua fortement, les envoyant dans un tourbillon écumant. Dès que Line eut retrouvé ses repères, elle remonta à la surface et traîna le corps de son ami jusqu'à la rive. Il était dans un sale état, une partie de son torse avait été lacérée par les rayons épineux des nageoires et l'épuisement de sa longue apnée avait teinté ses lèvres de reflets bleutés. Enrageant, Line l'écarta de la rive puis se tourna vers le monstre. Un cri affaiblit lui parvint alors.
- Liiiiine !! Je suis en vie ! Je suis dans la bouche du poisson !
C'était la voix de la fée qui était parvenue à planter sa lame, tel un hameçon dans la gencive de la créature.
- Je vais essayer de sortir ! cria-t-elle.
La jeune fille entendit des bruits de combat et de chair arrachée et une vibration puis un hurlement s'échappèrent du corps du poisson. Et soudain la fumée noire réapparut et le monstre grandit encore davantage.
- Arrête ! Il grandit ! s'écria Line.
- Quoi ?!
- Non attends ! Continue plutôt ! poursuivit-elle, revigorée tout à coup.
- J'arrête ou je continue ?? demanda la fillette ailée qui n'était pas sûre d'avoir entendu correctement.
- CONTINUE ! hurla Line impatiente.
La petite créature poursuivit donc ses attaques, ne comprenant pas trop la logique de l'histoire mais son amie semblait certaine de ce qu'elle faisait et elle avait toute sa confiance. Aussi ses coups plurent sans cesse, jusqu'à ce que les gencives de l'animal, qui s'agrandissait de plus en plus, soient couvertes de coupures sanglantes.
Pendant ce temps Line était bien en appui sur ses jambes, prête à bondir, la main sur l'épée, les yeux calculant le bon moment. Elle s'élança enfin, rebondit sur un rocher au bord de la rive puis sur la lèvre inférieure du monstre qui culminait maintenant à près de 5 mètres du sol, grimpa sur celle supérieure et s'élança pour s'agripper à son épée encore plantée dans l'œil. Elle se balança un moment ainsi pour prendre de la vitesse et lâcha pour atterrir sur le dos du Dichentraure. A cause de son œil blessé et de sa grandeur, ce dernier ne se rendit même pas compte qu'il était chevauché. Il aurait pu comparer les pas de Line à de vulgaires pattes de moustiques. Affolé et enragé, il tournait son œil valide de tous côtés pour l'apercevoir et son corps tanguait dangereusement. La jeune fille courrait le long de la nageoire dorsale, évitant les épines qui la ramifiaient et essayant de garder l'équilibre dans les remous incessants. Plus d'une fois la chute fut proche mais jamais cela ne se produisit. Elle se trouvait maintenant à la limite de la queue du monstre, l'endroit le plus dangereux car s'il remuait trop, il pouvait l'expédier en l'air, sur un rocher de l'îlot sur lequel se reposait son appendice caudal ou profondément dans l'eau. Après une grande inspiration et avoir réuni toutes ses forces, Line s'élança. Tant d'énergie avait été déployée dans ce premier mouvement que son pied dérapa et qu'elle chuta, glissant sur le dos vers les épines de la nageoire caudale. Elle ne put ralentir sa progression et les douloureux pics égratignèrent sa peau, l'entaillant assez profondément par endroit. Enfin son corps endolori atteignit la terre ferme de la bande de terre. Difficilement et en maugréant, la jeune fille se releva. La partie la plus dure avait été faite. Lentement, guettant le moindre soubresaut de la queue, elle avança. Son regard était concentré sur la dague que Giro avait dû abandonner, plantée à une cinquantaine de centimètres du fameux point faible, un globe rempli d'une fumée noire qui luisait faiblement. Sans lui, le pauvre poisson condamné à souffrir et à obéir, serait libéré et redeviendrait un bar tout à fait normal. Elle dut reculer plusieurs fois pour éviter des coups qui lui auraient été fatals mais finalement elle put se saisir de la dague et s'écarter. Malheureusement, le monstre avait bel et bien senti cela. Sa tête pivota sur le côté et son œil valide observa Line avec toute la haine possible. Il agita sa queue et comme s'il s'agissait d'une tapette géante et d'une vulgaire mouche, l'abattit violemment sur l'îlot. La jeune fille plongea pour l'éviter, sachant très bien que ce n'était pas dans son intérêt pour autant de rester immergée. Ses mains trouvèrent instinctivement des ancres afin que son corps ne soit pas emporté par la vague qui suivit l'impact. Une racine puissante s'offrit à ses doigts, à laquelle elle s'agrippa promptement. Il y avait un grand arbre sur cette bande de terre, mort, à l'écorce noire, mais encore droit. Peut-être qu'elle pourrait obliger le monstre à abattre sa nageoire caudale dessus et atteindre le point faible par la même occasion. Line attendit une autre attaque avant de se précipiter sur terre et courir vers l'arbre. La queue se dressa et redescendit avec violence. La jeune fille sauta dans l'eau, un craquement sonore retentit suivi d'un hurlement horrible. Sortant la tête de l'eau, elle put voir le spectacle surprenant qui s'offrait à elle. Le tronc de l'arbre avait créé un trou au centre de la nageoire, empêchant le poisson de la redresser. Son écorce se brisait sous les assauts répétés du monstre devenu fou de douleur et qui venait de recommencer à grandir. Les yeux de Line s'agrandirent de frayeur, si elle n'agissait pas vite, l'animal l'écraserait et qui sait quels autres dégâts il ferait ! Elle affermit la dague dans sa main et avec un cri de guerre s'élança vers le globe. Coup après coup, il se fissura et une fumée noire en sortit comme si elle avait été maintenue sous pression. Enfin dans un bruit mêlant le craquement de l'arbre qui venait de se rompre et le bruit cristallin de la sphère tombant en morceau, le Dichentraure se tordit dans un dernier soubresaut et rapetissa.

L'eau du lac était devenue rouge du sang de l'affreux poisson et Line répugna à la traverser, récupérant au passage son épée qui gisait dans la vase. La créature magique la rejoignit bientôt et déposa de la poussière de fée sur ses blessures dont la cicatrisation s'accéléra mais qui lui laissèrent à vie des marques sur le dos. Epuisée, elle s'allongea et regarda le soleil de fin d'après-midi. Son amie se précipita pour soigner Giro et veiller sur Zinéta. Line se releva sur son coude pour la regarder faire. Quand elle vit que ces deux autres compagnons avaient les yeux ouverts, elle soupira d'aise et avec difficulté se leva pour les rejoindre. Mais à peine avait-elle fait un pas qu'elle s'étala de tout son long. Un grognement s'échappait de sa gorge quand son regard se posa sur un étrange objet d'argent. Il était de forme ronde, trois branches liées en une voûte comme si elles étaient censées maintenir une sphère en place. Elle rejoignit ses amis.
- Regardez ce que j'ai trouvé.
- Qu'est-ce que c'est ? demanda Giro qui venait de se relever et gardait une main sur son torse, là où les lacérations cicatrisaient.
- On dirait un bouclier protecteur, remarqua Zinéta. C'est censé protéger des objets de toute sorte de chocs.
- Tu veux dire que ça pourrait contenir le sabre ou la pelle ? s'exclama Line.
- Je l'ai aperçu au fond de sa gorge…, dit la fée que ce souvenir n'enchantait guère.
- Ca doit être ça alors mais où est l'artefact ? demanda Zinéta. Regardez ! dit-elle en redressant sur son séant.
Contre l'une des branches du bouclier, un bout de parchemin était collé. L'écriture était délavée mais on pouvait lire « Je l'ai ! Vous …».
- Oh non… quelqu'un est passé avant nous… Comment allons-nous le retrouver ! dit Giro, exprimant tout haut la pensée de tous.
Ils se regardèrent les uns les autres, le désespoir s'emparant peu à peu d'eux. Ils n'avaient croisé aucun humain depuis leur arrivée alors ils doutaient de pouvoir trouver des réponses à leurs questions autrement qu'en se jetant dans la gueule du loup. Pourtant il fallait qu'ils obtiennent le pouvoir de vaincre… Sinon le monde ne serait jamais sauvé.

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